Un permis de polluer légal pour le Siba?

Environnement : Le Siba veut modifier les arrêtés préfectoraux pour pouvoir rejeter légalement les eux usées dans le Bassin en cas de fortes pluies…


19/09/24


Pauvre Bassin…

Le Siba (Syndicat intercommunal du bassin d’Arcachon) jamais à court d’idées fumeuses, et plus intéressé pour attirer les touristes et favoriser l’urbanisation, que par la protection de l’environnement du Bassin, veut pouvoir rejeter légalement les eaux usées dans certains points déterminés du Bassin en cas de forte pluies. Si, si… Plus c’est gros, mieux ça passe.


Flash back : Epidémie de gastro l’hiver dernier



Débordement au déversoir du Pont de Titoune


Rappelez vous l’hiver dernier… Des pluies incessantes, des réseaux saturés, pluvial, égouts. Ca déborde de partout, dans les fossés, les caniveaux, et tout ce sympathique bouillon de culture finit dans le Bassin. Bilan : Des huitres contaminées au norovirus et matières fécales avec une épidémie de gastro-entérite nationale juste avant et pendant les fêtes de fin d’année. Bonne année à toutes et à tous!

Et depuis la filière ostréicole rame pour retrouver la confiance des consommateurs…



Action en justice

Yves Foulon, le président du Siba, organe interco responsable des réseaux d’eau sur le Bassin, soutenu avec plus ou moins d’entrain par les maires du Bassin, déclarera n’avoir pas de responsabilité dans le manque de capacité du réseau à absorber des pluies exceptionnelles.

Tout ça a évidemment fini au tribunal après des plaintes déposées contre le Siba, notamment par la Sepanso (Société pour l’étude, la protection et l’aménagement de la nature dans le Sud-Ouest), la Ceba (Coordination Environnement du bassin d’Arcachon) et l’Adeba (Association de Défense des Eaux du Bassin d’Arcachon).


Sous pression, Siba et Eloa-Sb2a (Délégataire Service Public assainissement des eaux usées) ont proposé des mesures, mais le juge des libertés et de la détention en a ordonné d’autres pour faire cesser le trouble causé à l’environnement, notamment « La saisine, dans le délai de 4 mois, de la DDTM 33 pour officialiser la demande de construction d’un déversoir d’orage sur chacun des bassins de sécurité du réseau d’assainissement du bassin d’ Arcachon ;


Un dossier de 135 pages pour se dédouaner pénalement de toute pollution


Le temps a passé… Le Siba s’est mis au travail pour produire in fine un gros dossier de 135 pages portant sur « le système d’assainissement de Biganos et de La Teste « en cas de situation inhabituelles. »

L’Etat (DDTM) a demandé son avis au Parc naturel marin du bassin qui a présenté ses conclusions lors du conseil de gestion au grand complet jeudi 12 septembre.

Et là … Stupeur !



Amender les arrêtés préfectoraux

Le Siba entend amender les arrêtés préfectoraux des systèmes d’assainissement de La Teste-de-Buch et de Biganos pour y intégrer les situations climatiques inhabituelles durant lesquelles la collecte des eaux usées brutes ne parvient plus à garantir le transport des eaux vers les stations d’épuration.


5 déversoirs pour les réseaux saturés

C’est à dire, qu’en cas de fortes pluies durant au moins 7 jours d’affilés, les eaux usées non traitées pourront être rejetées dans des déversoirs, en retrait du littoral, à Lège, Lanton, Audenge, Biganos et Gujan-Mestras, mais « avec un système de surveillance ».

C’est sûr que ça va rassurer tout le monde…


Emplacement des déversoirs


A Lège


A Lanton


A Audenge


A Biganos


A Gujan-Mestras


Non sans un certain cynisme, on trouve aussi pour chaque site, le trajet suivi par les eaux chargées qui finissent leur course dans le Bassin (ci-dessous à Lège) .



L’intégralité du document « Porter à connaissance »du Siba avec tous les détails est à télécharger sur notre site ici.


Les défenseurs de l’environnement vent debout contre un permis de polluer

Le Siba joue encore une fois sur le soi-disant caractère exceptionnel des pluies fortes, alors qu’elles se produisent plusieurs fois dans l’année.

Les ostréiculteurs et les défenseurs de l’environnement, notamment la Ceba, sont vent debout contre cette démarche. Ils ne cachent pas leur colère. Thierry Lafon, ostréiculteur à Gujan, ancoen président du CRCAA, président de l’Adeba, ostréiculteur à Gujan-Mestras, fut l’un des premiers à dénoncer la pollution cet hiver avec photos à l’appui. Il pointe à nouveau du doigt le Siba comme responsable de la pollution.


Selon lui, l’intercommunalité « cherche avec ce cadre légal à éviter d’être rendu pénalement responsable.et le Siba abandonne le principe fondateur de l’assainissement du Bassin « zéro rejet dans le Bassin ».


Pour l’Adeba, les principaux points à clarifier concernent :

– La principale cause des débordements à savoir la multiplicité des zones inondées, 


– La règle locale « situation inhabituelle…/… En fait la situation 70 mm en 7 jours se produit régulièrement plusieurs fois par an en moyenne.


-Les travaux et aménagements proposés dans le cadre du « porter à connaissance » n’apporteront aucune amélioration à la situation et ne réduiront pas les débordements qui seront simplement suivis et légalisés. Aucune indication n’est apportée sur la communication de ce futur suivi des débordements auprès des usagers du Bassin (ostréiculture, plaisance, tourisme, …).


– Le « porter à connaissance » explique longuement le rôle épurateur du sol par filtration des débordements dans le sable, mais reconnaît ensuite que cela ne s’applique pas en cas de nappe affleurante (ce qui est le cas lors des débordements importants dus aux inondations).


Aucune estimation n’est fournie pour les volumes d’eaux usées déversés dans le milieu naturel et le Bassin lors des dernières crises, et leurs conséquences dramatiques ne sont même pas évoquées.


– La réduction significative de la multiplicité des zones inondées…/… nécessite impérativement d’aller plus loin que les plans d’action engagés par le SIBA (surtout sur les zones amont), en remettant fondamentalement en cause des pratiques d’urbanisation (suppression de fossés et crastes restreignant la continuité hydraulique, déni du caractère affleurant de la nappe, imperméabilisation) généralisées sur le territoire depuis des décennies et globalement toujours en vigueur.

(Voir l’argumentaire et les remarques sur le document du Siba par l’Adeba sur notre site, ici) 


Voir également deux guides à l’usage de tous ceux qui souhaitent participer à la lutte contre les mauvaises pratiques préjudiciables à la préservation de l’environnement: Restaurer fossés et ruisseaux et Contestation des permis de construire / pluvial


La réaction du CRCAA (Comité Régional Conchylicole)

Pour le syndicat des ostréiculteurs du bassin, la demande du Siba comporte  » des risques d’impacts sur les milieux naturels, mais au-delà, au niveau sanitaire pour les consommateurs des produits de la mer, et par voie de conséquence des risques d’impacts économiques considérables pour la filière ostréicole. Par deux fois, en 2021 et en 2023 les zones de production du Bassin d’Arcachon ont été fermées.


Sans que le lien de cause à effet soit aujourd’hui établi dans l’attente de la nomination d’un expert par le Tribunal administratif, il est clair que ces fermetures génèrent des pertes directes durant l’interdiction de commercialisation, des pertes indirectes après la réouverture et un préjudice d’image pour les professionnels et leur produit.

Jusqu’à preuve du contraire, ces deux épisodes ont démontré qu’aucun dispositif d’aide directe aux entreprises n’est mobilisable pour indemniser ne serait-ce que les pertes économiques directes. »


Un manque de courage et d’ambition pour préserver à long terme le Bassin d’Arcachon

Evidemment les mesures nécessaires pour combattre en amont la saturation des réseaux n’est pas simple. Elles demandent du travail (concertation et action entre élus du Bassin et des communes du bassin versant), et de la volonté pour changer de politique d’urbanisme.

La solution préconisée par le Siba a été raisonnée pour une implémentation rapide et à un cout abordable, avec des dégâts collatéraux d’occurrence faible, sur le papier…

Les événements de l’hiver dernier auraient pourtant dû conduire à une prise en compte de changement de climat.

Evacuer le trop plein d’eaux usées non traitées dans le Bassin ne résoudra pas les problèmes sanitaires, environnementaux et économiques, bien au contraire.


Mais nous ne sommes qu’au début du process…

Ce sont les services de l’Etat, et le préfet de Nouvelle aquitaine, Etienne guyot, qui trancheront.

Et de nouvelles actions judiciaires des défenseurs de l’environnement et des professionnels de la mer ne sont pas à exclure…

A suivre!


Découvrez tous nos articles sur ce dossier de pollution du Bassin, ici 


  Michel Lenoir


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