Banc d’Arguin : La ministre privilégie l’environnement et les zostères
Environnement/Nautisme : La Secrétaire d’Etat Wargon est venue pour rappeler les positions du gouvernement pour la RNN d’Arguin
24/10/19
A moins d’être parti(e) vivre depuis plus de 5 ans en retraite monacale exclusivement consacré à la méditation ou la prière, la difficile gestion des diverses activités maritimes sur le Bassin, n’a pas pu vous échapper.
Petit résumé
Néanmoins pour les nouveaux arrivants et ceux qui auront manqué un épisode de ce feuilleton plus palpitant que « Plus belle la vie », voici un petit résumé.
Les acteurs : les ostréiculteurs, les pêcheurs, les bateliers, les professionnels de l’industrie nautique, les plaisanciers, et… les gardiens du temple, à savoir les associations de défense de l’environnement.
Et au milieu, juges et parties, les pouvoirs publics, et les élus du Bassin.
Le Parc Naturel Marin du Bassin d’Arcachon (PNM), un outil arrivé trop tard ?
Après des décennies de chamailleries, pour que toutes les activités puissent s’exercer en bonne intelligence, que les uns et les autres puissent se parler et trouver des solutions consensuelles, un bel outil a vu le jour : Le parc naturel marin, qui rassemble plus de 50 représentants sous la férule de François Deluga.
Et ça fonctionne. Doucement, pas à pas, mais ça avance. Sauf sur un point.
Le caillou dans la chaussure pour le bien-vivre ensemble
Car sur le Bassin, existe une zone que l’Etat a classé en Réserve naturelle nationale (RNN) en 1972 autour et englobant le Banc d’Arguin et plus récemment le Banc du Toulinguet.
Sa vocation est de protéger des activités humaines la nidification, la halte migratoire pour de nombreuses espèces d’oiseaux, dont en particulier la sterne caugek.
Or l’homme n’est pas le seul en cause. Cette année la colonie de sternes a subi l’attaque de prédateurs tels que les milans et autres goélands.
Mais dans cet espace, c’est l’Etat qui décide, avec délégation de gestion et de pouvoir de police à la Sepanso, organisation de défense de l’environnement, qui ne cache pas ses objectifs : faire de la Zone de la RNN à terme, un sanctuaire de protection de l’environnement, ou l’activité humaine est exclue.
On comprend alors que ça tousse un peu chez les professionnels de tous bords et les plaisanciers, utilisateurs du lieu.
Ces derniers ont à deux reprises, bruyamment exprimé et avec force arguments leur opposition aux décrets de la préfecture précisant les modalités d’accès et d’utilisation de la zone.
(voir nos articles sur la RNN et ce sujet, ici)
Les traditions face à l’expansion démographique
Pour toutes les personnes habitués depuis des générations à venir profiter peinard ou en famille d’un rayon de soleil sur ces bancs de sable, là comme n’importe où sur le plan d’eau, la pilule est rude à avaler. Il est loin de temps de papé et mamé… En 1970 , le bassin comptait 70.000 habitants. En 2020, 150.000 … Et en 2030 ? Le SCOT le dira, mais les 220.000 seront largement dépassés.
Une ministre au Bistro
La secrétaire d’Etat Emmanuelle Wargon est venue remettre les pendules à l’heure.
Lors d’une réunion dans un bar au Moulleau (c’est plus convivial), les représentants des différentes activités ont pu s’exprimer et expliquer leur ressentiment.
Les ostréiculteurs
Même les ostréiculteurs sont inquiets pour leur 45 ha de parcs. Les zostères, ces herbiers qui servent de nurserie à la faune marine, si nécessaires à l’écosystème, se développent sur le Banc, alors qu’ils ont disparu du Nord Bassin entre Arès et Biganos.
Et le ministère de l’environnement entend bien leur donner la priorité. Quitte à déplacer les parcs….
Ostréiculture et cartographie des zostères sur le Banc d’Arguin
La sous-préfète d’Arcachon, Houda Vernhet, a réuni en début de semaine, les représentants de la Sepanso, du comité régional de la conchyliculture Arcachon Aquitaine, de l’Ifremer et des services de l’Etat afin de présenter le travail de cartographie des zostères réalisé par le parc naturel marin à la demande de la préfète de région.
Ce travail de cartographie a été mené en deux temps :
– un recensement précis des herbiers de zostères, plantes aquatiques marines qui font l’objet d’une protection sur l’ensemble du bassin ;
– une interprétation de la cartographie et la définition des secteurs sur lesquels l’activité ostréicole ne doit pas être poursuivie.
Les résultats font apparaître une présence massive d’herbiers de zostères dans la zone centre du Banc d’Arguin qui ne permet pas la poursuite de l’activité ostréicole dans ce secteur (ce qui représente environ 4 hectares sur les 45 attribués). Par conséquent, les parcs situés dans la zone centre vont devoir être déplacés dans les zones nord et sud du Banc.
Les services de l’Etat délivreront très prochainement les autorisations d’exploitations nécessaires.
Pour la zone centre, un travail va être mené sur les surfaces à réattribuer en tenant compte des résultats de l’étude. Une nouvelle enquête administrative et un processus de zone de réimplantation au sud et au nord vont être réalisés avec la détermination de zones vacantes. Une régularisation sera engagée et la délivrance des titres devrait avoir lieu cet hiver.
Parallèlement le Parc naturel marin réunira la la Commission « Zostères » le 22 novembre prochain pour présenter les avancées récentes de quelques travaux relatifs à la stratégie de restauration des herbiers. Les conclusions des échanges seront présentées au prochain Conseil de gestion.
Mais Thierry Lafon, Président du CRCAA, reste sur la réserve… Les ostréiculteurs voudraient être certains qu’une fois fermés au centre du Banc, les 4ha seront bien redisposés ailleurs…
Les plaisanciers inquiets
Comme l’ont fait remarquer les représentants des plaisanciers à cette réunion, on a pu constater un transfert des mouillages du Banc vers l’Ile aux oiseaux. Ce qui inquiète aussi les conchyliculteurs, car tous ces bateaux autour des parcs peuvent générer des pollutions et contaminer les coquillages. Le Nord Bassin se vidange tous les 21 jours, contre 2 fois par jour au banc d’Arguin.
Les plaisanciers à mots couverts, expriment leur crainte que l’accès à l’Ile finisse aussi à court terme, par être très réglementé, voire interdit.
La Secrétaire d’Etat a rappelé que la RNN d’arguin était une « exception » puisque la présence d’activité humaine est tolérée et encadrée. C’est ce cadre défini par le décret de 2017, étendu cette année, que les plaisanciers contestent.
L’association des pêcheurs plaisanciers (Auppm33), demande par exemple de pouvoir s’adonner aux joies du surf casting dans l’extrême sud du Banc à marée basse.
La Caub’Arc qui les représente dénonce la manipulation des chiffres par la Sepanso : « La SEPANSO dresse un bilan : le nombre d’infractions recensées en 2018 a explosé. On en dénombre 2274, soit trois fois plus que les années précédant le décret…/… Cette proportion volontairement choquante n’est pas relativisée par des observations objectives. Par exemple, souligner que par le décret de 2017, la RNN s’est agrandie de 300 % par rapport à sa dimension du décret précédent. Les infractions s’en suivent donc dans les mêmes proportions. L’interdiction de pêcher à pied est récente et très peu diffusée. Il y a eu donc 951 infractions nouvelles, y compris pour des enfants qui ramassent quelques coquillages. Idem pour les 134 infractions de mouillage soi-disant hors zone. La circulation dans les ZPI perdure car elles ont été étendues de 12 fois en 10 ans !. »
Le point de vue de la secrétaire d’Etat: « Quelle est la plaisance possible et soutenable à l’échelle du Bassin ? »
Après avoir entendu toues les parties, on peut le résumer en une phrase dont l’objet dépasse la RNN : « Quelle est la plaisance possible et soutenable à l’échelle du Bassin ? »
La réponse est dans la question, mais les interprétations ne vont pas manquer. De future réunions avec la préfecture sont prévues.
Le comptage des bateaux… par Radar
Les chiffres fournis par la Sepanso sont contestés par les utilisateurs du banc. Une solution pourrait voir le jour à l’initiative du PNM : on commence à parler d’un comptage possible des bateaux par radar, 7j/7 et 24h/24, pour avoir une cartographie précise de la circulation nautique sur le plan d’eau. ..
Nous n’avons pas encore eu connaissance des techniques qui pourraient être utilisées, mais cet outil serait apprécié aussi par les ostréiculteurs pour une bonne raison : la surveillance des parcs, notamment en période de fin d’année…
Michel Lenoir
(Photo Banc d’Arguin Clément Viala)