La France d’avant: Le laitier et la ferme…
Début des années 60 : Comment récupérer son lait…
12/03/25
Ah, la France d’avant! InfoBassin propose une série d’articles sur l’histoire du temps jadis, sur le Bassin et ailleurs…
Nous poursuivons avec le témoignage de Joel Laine, Lantonnais qui passa son enfance dans le Borinage. C’est un peu d’exotisme du pays des Hauts de France, qui évoquera aussi des souvenirs pour les habitants des autres régions…
Michel Lenoir, directeur de publication
Ecouter en 3 mn le podcast, de cette histoire racontée par Joel Laine, ici !
Le passage du laitier
Quelques coups d’une petite trompette en cuivre provoquaient l’agitation de toute la rue : le laitier annonçait ainsi son passage.
Les ménagères abandonnaient leurs activités pour saisir le pot au lait et la monnaie préparés à l’avance et se jeter dans la rue.
Groupées à l’arrière de l’estafette (Citroën surnommée « nez de cochon ») elles en profitaient pour papoter en attendant leur tour. On pouvait alors se faire servir le nombre de « pintes » dont on avait besoin.
La mesure, cylindrique réalisée en aluminium, était fixée au bout d’un long manche. Après sa tournée de ramassage, un peu avant le lever du jour, dans « ses » fermes, il amenait les « bidons » d’une trentaine de litres dans son véhicule pour y plonger avec délice sa « mesure ».
Au bon beurre…
On pouvait aussi s’y procurer une « pièce de beurre ». il se vendait à la livre ou à la demie-livre, emballé dans du papier sulfurisé. Les ménagères en profitaient pour échanger quelques informations probablement essentielles tandis que les enfants parcouraient la rue dans les deux sens, courant à pleines jambes et poussant des cris sauvages..
La ville offre ces petits instants de liberté et de plaisir ! Mais, à la campagne, ce moment devenait une aventure…
Le lait de la ferme
Il fallait se rendre à la ferme chercher le lait de la traite matinale, tout au bout du village. C’est avec fierté que mon frère et moi acceptions cette mission alimentaire essentielle ! Le pot au lait métallique à la main, le couvercle bringuebalant au bout de sa chainette, nous nous élancions pour la traversée du village.
La marche tranquille était abandonnée dès le coin de la rue pour laisser la place à des déplacements plus joyeux : la marche à cloche-pied, le saut sur un pied sur la bordure du trottoir, ou la course au caillou propulsé à coups de pied. Tout au long du trajet, le couvercle tintinnabulait au bout de sa chaînette.
Les odeurs de la campagne
Nous approchions de la ferme : c’était d’abord l’odeur qui nous prévenait, celle du fumier en plein air au milieu de la cour. Une odeur de campagne et de vaches qui ne nous semblait pas si désagréable puis venait le bruit des mouches se déplaçant bruyamment en véritables escadrilles pour revenir sur ce fumier qu’elles venaient de quitter. Nous étions alors proches du porche d’entrée.
Les poules caquetant dans la cour se pressaient vers nous dans l’espoir de quelques friandises que, bien entendu, nous n’avions pas. Quant au coq, magistral maître des lieux, il avait surveillé la scène du haut de la barrière, prêt à fondre sur la nourriture en faisant s égayer les poules ! Une fois le porche passé, l’odeur s’anoblissait car nous longions les écuries des percherons et boulonnais, lourds chevaux de trait.
La laiterie
Venait ensuite la laiterie ; après un bref instant d’inquiétude, en cherchant le petit paquet de monnaie au fond de la poche, nous prenions une profonde inspiration avant d’y pénétrer : c’est que l’odeur y était plus forte qu’ailleurs : à celle du lait se mêlait l’acidité du « petit lait » s’égouttant des toiles contenant le fromage blanc.
Le redoutable Crastofi
Celui-ci servait ensuite à la fabrication du « crastofi », redoutable fromage paysan qui s’annonçait bien avant d’être à table ! Parfois il fallait aller chercher la fermière à l’étable, au milieu de ces énormes laitières, ou au pré où elle conduisait ses bêtes.
Elle nous servait, plongeant sa mesure dans l’un des bidons sagement alignés contre le mur, sous les planches supportant les fromages. Le long de l’autre mur, les toiles de caillé s’égouttaient dans des bassines et, sur un table trônait la motte de beurre et ses moules en bois trempés à l’eau salée.
Un retour joyeux!
Le retour était tout aussi joyeux qu’à l’aller, et il n’était pas rare que le niveau dans le bidon soit un peu réduit, ou que le lait soit un peu trop mousseux.
Le regard soupçonneux de la grand-mère nous métamorphosait en innocents étonnés de cette constatation !
Joel Laine
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