Humour : Les Nouvelles Lettres Persanes de Charles Daney (Ep 4)
Une dune blonde comme l’or…
Voici le regard perçant d’un Persan, sur les gens de notre région, façon Montesquieu…
Les Nouvelles Lettres Persanes (par Charles Daney) : Episode 4
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D’Usbek à Rica
Me promenant sur le rivage j’y ai vu que la terre faisait des rouleaux à l’imitation de ceux de l’Océan et qu’entre les deux l’eau allait et venait sans cesse, ce qui est bien étrange à nos yeux qui ont l’habitude de voir la mer bien rangée le long du rivage.
Les rouleaux de l’Océan bougent beaucoup plus que les rouleaux de terre dont on m’a dit qu’ils étaient autrefois plus mobiles que les dunes de nos déserts. Un Monsieur Brémontier, ingénieur des Eaux et Forêts de son état, a même dit qu’ils allaient recouvrir Bordeaux de leur sable. C’était il y a plus de deux siècles.
Depuis, ils ont recouvert quelques jardins à La Teste. Je pense que c’est cela qu’on appelle l’exagération gasconne bien qu’on la trouve dans les discours de leurs politiques– qui ne sont pas tous gascons.
Les flots les assaillent à coup de vagues et leur donnent cet aspect abrupt de murailles que nous leur avons vu face à l’Ouest de la pointe du Médoc jusqu’au pied des Pyrénées.
C’est même ce qui aurait donné l’idée aux Allemands de les prendre pour modèle du front de l’Atlantique. Les blockhaus qu’ils y ont construits sont allés leur lécher les pieds, une façon bien à eux de leur faire allégeance.
L’une de ces dunes est restée nue comme au jour de sa naissance. J’ai demandé à un indigène pourquoi elle l’était toujours. Il m’a répondu que c’était pour attirer les touristes.
Ces gens là sont incroyables.
Non seulement ils vont nus ou presque mais encore ils exigent que la nature le soit et le Maire de La Teste plus que tout autre, qui pense que la vêtir de pins serait une véritable catastrophe, bien qu’elle fut autrefois une menace pour ses jardins.
C’est une dune blonde comme il y en a chez nous, mais très haute, à plus de cent mètres, une dune que le vent d’hiver recouvre de ghours ou croissants en réduction qui lui font la chair de poule tant elle est transie.
Ces petits boutons disparaissent l’été quand le soleil et les pas des visiteurs tavellent sa peau de traces plus larges que les pieds de nos dromadaires.
Elle est blonde comme l’or. Je me demande si ce n’est pas pour cela que le préposé à la dune a refusé que j’en prenne un petit sac pour t’en rapporter. Il prétend qu’elle est classée et l’on m’a dit que les douaniers font quelquefois déchausser les gens pour voir s’ils n’en gardent pas quelques grains dans leurs chaussures.
J’ai des doutes quant à la capacité des chiens policiers de trouver des caches de drogues ou des trésors dans le sable chaud. J’ai pourtant tout rendu.
Tout le monde sait là-bas que je suis un « estrangey » et je ne peux me permettre la moindre excentricité qui pourrait déclencher une avalanche politique comme c’est arrivé pour quelques diamants qu’avait rapportés de l’étranger un Président de ce pays.
Je t’expliquerai dans ma prochaine lettre pourquoi les gens d’ici feraient des folies pour habiter des cabanes…
Charles Daney
Illustration copie écran TrekEarth.cm.
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