Edito : Le combat du Banc d’Arguin : Traditions Vs Preservation…
L’Oeil au Beurre de Lenoir : Le tourisme de masse… ici et ailleurs
23/06/19
C’est l’histoire d’un bout de paradis, de sable blond et d’eau turquoise. Un film avec Guillaume Canet y est tourné. Un succès mondial. Des milliers de gens vont vouloir découvrir l’endroit. Au point que les autorités décident d’en interdire l’accès au public.
Le Banc d’Arguin ? Le Bassin d’Arcachon et les Petits mouchoirs?
Non. L’ile de Kho PhihPhi en Thailande. Un reportage TV de France2 édifiant cette semaine nous apprenait que, la plage de Maya Bay, rendue célèbre par le film La Plage avec Guillaume Canet, Virginie Ledoyen et Leonardo DiCaprio restera fermée jusqu’en 2021 afin d’obtenir une restauration complète des récifs coraliens détruits par le tourisme de masse.
Avec deux images fortes : Celle de bateaux si collés les uns aux autres au bord du rivage, qu’on ne voit plus l’horizon depuis la plage. Et celle du massif coralien, dévasté.
Un autre regard sur le Bassin
Le hasard de l’actualité met là en lumière autrement la sortie du nouvel arrété de la préfecture du 13 juin 2019 consolidant le décret de mai 2107 annoncé dans nos colonnes. Il porte la création de zones de protection intégrale (ZPI) au sein de la Réserve naturelle nationale du banc d’Arguin dans lesquelles l’accès est interdit, afin de préserver différents enjeux de la biodiversité : nidification des oiseaux, habitats, notamment de l’estran sableux.
Nous avions déjà longuement évoqué la situation au Banc d’Arguin dans notre article du 12/06/2018 (A (re) découvrir ici).
(Voir l’arrêté dans son intégralité ici : Arrete ARGUIN 13 06 19)
Le communiqué de la Préfecture
« Le banc d’Arguin bénéficie du statut de réserve naturelle nationale par arrêté ministériel du 4 août 1972. Le décret du 10 mai 2017 portant extension et modification de la réserve naturelle nationale du banc d’Arguin prévoit que des arrêtés d’application soient pris afin de préciser les différents zonages ainsi que les règles relatives aux activités telles que le mouillage des navires, la pêche, l’ostréiculture et le débarquement de passagers. A la suite de la parution de ce décret en 2017, une série d’arrêtés avaient été signés en 2017 et 2018.
Compte tenu des mouvements des bancs de sable au sein de la réserve naturelle, de la nécessité d’assurer la sécurité des usagers, des enjeux de préservation de la faune et de la flore au sein de la réserve naturelle, ainsi que dans l’optique de préserver certaines pratiques professionnelles ou de loisirs, 3 nouveaux arrêtés ont été signés.
Meilleure protection de la biodiversité conciliée avec la fréquentation du banc par le public
Le 13 juin 2019, Fabienne BUCCIO, préfète de la Gironde, a signé un arrêté modifiant les zones de protection intégrales. Ces zones représentent les parties interdites au public sur la réserve. Elles visent à préserver les enjeux de biodiversité les plus forts. Il s’agit, en particulier, des zones de nidification de différentes espèces d’oiseaux protégées, (gravelot à collier interrompu, huîtrier-pie, et sternes caugeks notamment), ainsi que des habitats dunaires et herbiers de zostères.
Au total, les zones de protection intégrale couvrent désormais 212 ha, contre 159 ha précédemment. Aucun sentier n’existant sur le banc, ces zones interdites d’accès délimitent les cheminements libres aux visiteurs afin de concilier préservation de la biodiversité et fréquentation touristique.
Amélioration des conditions de débarquement des passagers et mise à jour des zones de mouillage et de stationnement des navires
Le 14 juin 2019, le vice-amiral d’escadre Jean-Louis LOZIER, préfet maritime de l’Atlantique, a signé deux autres arrêtés. Ils encadrent, d’une part, les conditions de mouillage et de stationnement des navires au sein de la réserve, et d’autre part les conditions de débarquement des passagers transportés par des sociétés professionnelles de transport maritime.
Le déplacement du point de débarquement de passagers le plus au sud permet de débarquer des personnes dans un secteur plus grand et plus sécurisé que ne le permettait le point de débarquement précédemment autorisé.
La zone où le mouillage est autorisé à l’est du banc d’Arguin n’a pas changé. Le banc du Toulinguet ne présentant plus des conditions de mouillage sécurisé, le mouillage n’y est plus autorisé. »
La colère des plaisanciers et de l’industrie nautique
Deux ans après, les mêmes causes produisent les mêmes effets : la colère des plaisanciers et d’autres utilisateurs du Banc regroupés au sein de la Caub’Arc (Confédération des associations d’usagers du Bassin d’Arcachon) (voir notre article du 26/09/17, ici).
Cette association défend au nom des traditions et du bien vivre sur le Bassin d’Arcachon, la possibilité d’une utilisation raisonnée et partagée de cet espace restreint.
Dans un tract invitant à une action samedi 29 juin à 10h au port d’Arcachon, ils indiquent : « Arguin et Toulinguet bientôt interdits aux humains …/… Le banc du Toulinguet sera totalement interdit et deviendra une zone de protection intégrale, 95 % du littoral des bancs seront à la fois interdits de stationnement ou inaccessible en bateau, 95 % du territoire sera interdit à la circulation des promeneurs… »
Et Joel Confoulan, le président de la Caub’Arc précise : « Aucune étude scientifique ne justifie cette mesure inique et largement inspirée de l’idéologie politique de la Sepanso à qui la préfecture a confié les clés du site et le pouvoir de police ! Aucune étude économique n’a calculé l’impact que va générer inévitablement ce nouvel arrêté. Non seulement à l’encontre de toutes les entreprises du nautisme mais, par effet induit, les coopératives maritimes et toute l’économie touristique centrée sur une image de liberté et de grands espaces accessibles. Aucune étude écologique n’a anticipé les conséquences de transfert concentré des usagers vers des lieux encore accessibles. »
L’Ile aux Oiseaux en ligne de mire ?
Car si le Banc le Banc d’Arguin est délaissé, l’Ile aux Oiseaux restera abordable. Pour l’instant. Car compte tenu de la déjà très haute fréquentation de ce petit coin de rêve aux cabanes tchanquées, il se pourrait que là encore des mesures soient prises à l’initiative de la Sepanso, à plus ou moins long terme, pour la préservation du milieu.
Le problème du tourisme de masse
C’est tout le problème d’un croissance non maitrisée du tourisme de masse.
A Kho Phi Phi, c’est l’arrivée massive des ressortissants Chinois (mais pas qu’eux) qui a provoqué l’interdiction du site. Ils aspirent légitimement à pouvoir voyager et découvrir d’autres cultures et les joyaux de la planète.
Les élus de la région et du Bassin, en sont, eux, à continuer à promouvoir vaillamment le triangle Bordeaux-Vignobles-Arcachon, en France, à l’étranger, et notamment auprès des autorités et des tour-opérateurs de voyage chinois, pour inciter davantage de vacanciers à venir chez nous.
Pour le Bassin, franchement, est-ce bien raisonnable d’en rajouter?
Michel Lenoir
C’est gratuit