Histoire : La suite de la discorde entre Gujan et Mestras…
Gujan-Mestras
Histoire … Quand Gujan ne voulait plus de Mestras : « La bataille de la gare »
Par la SHAAPB (2/2)
24/07/19
Le Bassin a son histoire. Et les membres de la Société Historique et Archéologique d’Arcachon et du Pays de Buch (SHAAPB) la content fort bien. Ils éditent une revue régulière à laquelle vous pouvez vous abonner. C’est passionnant, et nous leur ouvrons nos colonnes…
Michel Lenoir, Directeur de Publication
Texte de Jean Dazens †, auteur de « Mémoire de Gujan-Mestras » et « Gujan-Mestras raconté par ses rues et lieux-dit », mis en forme par Olivier Narp.
Voir le 1er épisode de l’histoire dans notre article de la semaine dernière, ici.
La bataille pour la gare précède tout juste la demande de scission des deux communes. L’exacerbation des esprits n’y est sans doute pas pour rien, et Pierre Daney accuse d’ailleurs la Compagnie du Midi d’en être responsable : « La Compagnie indispose les habitants les uns contre les autres, fait naitre des haines, réveille des inimitiés éteintes ou assoupies, brouille des amis, divise des parents, bouleverse enfin toute une commune ».
Mais, avec le recul, on peut dire, au contraire, que cette gare unique, construite à l’époque en pleine campagne, a joué le rôle de ciment entre les deux quartiers.
Le difficile passage de cinq stations de chemin de fer à une seule
A l’origine, il n’y avait pas seulement deux stations mais cinq, chacune correspondant à un quartier : Canteranne près du Teich, Mestras, Gujan-bourg, Meyran et La Hume. La Compagnie du Midi commença par supprimer les deux moins importantes (Canteranne et Meyran), le projet final était de rassembler celle de Gujan et celle de Mestras en une seule.
Au début, le conseil municipal exprime «l’indispensable nécessité du maintien des deux gares, en considération […] de la nombreuse population disséminée dans quatre quartiers » (15 novembre 1853).
Pendant dix ans, le débat est vif, animé par les pétitions des habitants, les lettres de Daney et les délibérations du conseil municipal.
Prenant peu à peu conscience de la ferme volonté de la Compagnie du Midi de desservir une seule gare (comme le confirme l’adoption du projet en avril 1859), chacun des quartiers a cru longtemps que c’était la sienne qui serait conservée, mais c’est finalement une nouvelle construction qui est envisagée (c’est donc la gare actuelle, inaugurée en 1863) sur un nouvel emplacement, sans habitation, proche du petit port de Larros.
Ouvrir un nouveau chemin pour une nouvelle gare
Afin de relier la nouvelle gare aux (futures) zones d’habitation, le conseil municipal de juin 1864 décide d’ouvrir un nouveau chemin, pompeusement appelé « l’avenue de la Gare », seule ligne droite de la commune. A ce moment, la demande de scission des communes est déjà effectuée par le conseil municipal, et l’on ne peut donc s’empêcher de penser que le quartier de Mestras considère la construction de la gare comme une première étape de sa démarche.
La nouvelle gare est en effet plus proche de la station de Mestras (250 m) que de celle de Gujan (850 m), et c’est à l’extrémité de l’avenue de la Gare que l’on prévoit d’ériger la future nouvelle église de Mestras.
L’appel à l’union du préfet
C’est d’ailleurs aussi à ce moment, comme on l’a déjà vu, que les Gujanais réclament à leur tour la sécession, pour ne pas avoir à financer cette église jugée d’un coût exorbitant. Les conseillers municipaux de la section de Gujan écrivent dans leur lettre au préfet du 30 septembre 1865 : « La commune ne possède pas les moyens nécessaires pour faire face à une dépense aussi considérable […]. Au lieu de faire cesser la division qui existe, cette nouvelle église ne servira qu’a perpétuer et aggraver tous les différends qui règnent ».
Au bout du compte, et malgré la volonté de chacun des quartiers de se séparer de l’autre, la demande est refusée, à la suite d’une « visite de révision »effectuée par le préfet le 27 avril 1866. Il renvoie en quelque sorte dos à dos les deux quartiers et, faisant allusion à la place prise par « les clochers » dans la querelle, il lance un « évangélique appel à l’union de tous… à l’union des habitants dont l’autorité supérieure ne connait que trop la fâcheuse position entre eux, à laquelle il importe enfin de mettre un terme car elle n’est vraiment plus tolérable. »
Pas de nouvelle église
L’église nouvelle ne fut donc jamais construite et la chapelle de Mestras resta au rang de chapelle, pour preuve le refus du conseil municipal d’accorder au fils cadet de Pierre-Eugène Dignac, la possibilité de célébrer le mariage de sa fille dans la nouvelle chapelle de Mestras en 1902.
A cette date, on devine que les querelles ne sont pas éteintes. Longtemps, les bagarres ont opposé les membres des deux sociétés musicales malgré les recommandations préfectorales, et il a fallu trois propositions (en 1879, 1919 et 1935) pour que soit adoptée par le conseil municipal la nouvelle dénomination de la commune, scellant par son caractère double la dualité enfin réunifiée des quartiers.
A présent, gageons que la sérénité a gagné les esprits et que le trait d’union de 1a dénomination Gujan-Mestras porte donc très bien son nom!
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