Chronique du spectacle folklorique électoral…

Humour satirique : De Bonaparte à Trump, la démocratie en question…


18/06/24


Par Alain Mouginet, écrivain, ancien éditeur, demeurant sur le Bassin.


Je ne sais pas vous, mais moi j’ai une fille qui, pour des raisons professionnelles, voyage à l’étranger. Elle a chaque fois la gentillesse de me ramener un souvenir, typique de l’endroit où elle a séjourné. Dernièrement, de retour de Tokyo, c’est sur une bouteille de whisky pur malt que s’était porté son choix… Excellent par ailleurs.


Tante Apolline, qui n’en rate pas une, n’a pas manqué de donner son avis par une réflexion bien sentie : « Ma pauvre fille, ton soi-disant Whisky, c’est du pipi de chat ; tu n’imagines quand même pas qu’un Niakoué soit capable de rivaliser avec ma sublime tisane écossaise ? ».

Bizarrement, quelques jours plus tard, la fameuse bouteille avait nettement pris un coup dans l’aile et la part des anges n’y était pour rien.

M’enquérant auprès de ma chère tante sur cette surprenante évaporation, elle me concocta une réponse bien dans la norme de sa mauvaise foi légendaire : « Bon, je l’ai juste goûté, disons qu’il désaltère ! ».



Cette semaine, de retour de San Francisco, ma fille m’avait réservé deux surprises : une paire de chaussettes… siglée prison d’Alcatraz (il faut être États-Unien pour imaginer un produit dérivé sur une prison)… Et, manière de me faire enrager, l’officielle casquette rouge signée Donald Trump ! Cette signature d’ailleurs ferait les beaux jours d’un psychiatre en mal d’analyse…


Lors des grands meetings de celui qui brigue la Maison-Blanche, c’est une forêt de casquettes rouges qui emplit les salles… et les caisses de Trump, avec nombres de produits dérivés comme ces magnifiques baskets couleur or à 399 dollars, cette eau de Cologne à 99 dollars le flacon, sa tête faisant office de bouchon.


Certes, tout ce bric à brac n’est pas du meilleur goût, mais, ce qui m’interpelle, c’est le niveau de réflexion des acheteurs. Eux qui soutiennent sans réserve et applaudissent à tout rompre les saillies de leur champion – notamment lorsqu’il fustige l’Empire du Milieu en promettant de rapatrier les emplois perdus – devraient prendre connaissance du lieu de fabrication de leur couvre-chef : la Chine !


Du crépuscule de la démocratie

Il est vrai que le populisme ne s’embarrasse pas de ce genre de paradoxe ; plus c’est gros, plus ça passe ! Cette sorte d’idéologie fait la promotion d’un peuple imaginaire rejetant les élites, fustigeant un complot trahissant les intérêts fondamentaux d’un pays, en y ajoutant un zeste d’anti-intellectualisme, une pincée de xénophobie… et le tour est joué !


Cela dit, ne nous moquons pas trop vite de nos amis d’outre-Atlantique, notre situation politique actuelle n’est pas un modèle du genre et tient plus de la comédie de boulevard que du débat démocratique.

A ce sujet, je viens de lire un article dans lequel le journaliste, manifestement enthousiaste, précisait que notre Emmanuel était « prêt à repartir sur le terrain avec la détermination d’un Bonaparte au pont d’Arcole »…

C’est oublier un peu vite qu’au-delà de l’image héroïco-romantique, le futur empereur s’était en fait lamentablement vautré dans la boue et y serait encore sans l’aide de ses soldats…


A gauche: Je t’aime , moi non plus…

Pour le reste, rien de nouveau sous le soleil – bien timide ces temps ci. Les différents éléments de la gauche, qui hier encore s’écharpaient allégrement, passant leur temps en insultes et anathèmes, viennent – sans honte au Front – de se jeter dans les bras.

C’est plus de cent ans de « Je t’aime, moi non plus » que tous vont fêter dans la joie des retrouvailles. Ah ! Mythifier son passé pour réenchanter l’électorat , que voilà une belle idée ! Après le « Bloc des gauches », le « Cartel des gauches », le « Front populaire », le « Front républicain », le « Programme commun », « L’union des gauches », la « gauche plurielle », nous voici avec « le nouveau Front populaire »… C’est d’un monotone !


A droite: Comme au théatre de Boulevard

A droite, c’est bien plus rigolo : on s’écharpe joyeusement et les portes claquent.

Marion divorce d’Eric, qui se retrouve plus seul que jamais.

Dupont de Saint-Machin ne sait plus à quel saint se vouer pour pérenniser sa petite boutique. Les « patriotes » forts de leur résultat de 0,93 % sont au bord du trou noir.


La palme revenant au gentil Ciotti, cloué au pilori par ses amis alors qu’il n’avait vraiment rien fait de mal, pensant seulement sauver sa peau. Tel un Mirabeau d’opérette « Je suis ici par la volonté du peuple et n’en sortirai que par la force des baïonnettes », il s’est barricadé dans son repaire, mais tenaillé par la faim, il a fini par échapper à ses poursuivants en passant par le vide-ordures !


Quant au grand vainqueur des élections européennes, le voilà aux portes du pouvoir. Pourtant, sa mesure phare de ramener la retraite à soixante ans est déjà passée à la trappe dans son futur programme législatif…

Heureusement, il reste – pour le moment – sa baisse promise de la TVA sur les carburants qui ne devrait coûter qu’une petite dizaine de milliards par an…


Alain Mouginet

Photo A. Mouginet


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